Interview FEHAP – Loi 2002-2

  • Pouvez-vous nous présenter votre outil J’AIMERAIS QUE ÇA SE PASSE COMME ÇA POUR MA FIN DE VIE ET APRÈS : ? 552

L’outil « J’aimerais que ça se passe comme ça pour ma fin de vie et après », est un support pédagogique, de la Plateforme ViP, créé par et pour les personnes accompagnées et les professionnels de terrain dont le but est de favoriser l’expression de la volonté des personnes sur leur fin de vie et après, et ainsi d’être acteurs jusqu’au bout.

Du fait de son modèle de conception participatif, cet outil s’adapte aux besoins de personnes aussi bien sur le fond (thèmes abordés, terminologie employée…) que sur la forme (feuilles cartonnées, détachables…)

  • Comment a-t-il été construit ? en lien avec les personnes accompagnées ? 1226

L’idée de concevoir cet outil découle d’une recherche action menée en 2019 sur la question du

vieillissement en Pension de Famille. Le constat qui ressortait de cette enquête était triple : 

  • Les droits des personnes sur ces thématiques sont inconnus par les personnes elles-mêmes et par les professionnels qui les accompagnent. 
  • Certaines situations de décès ont été difficiles à vivre pour les professionnels et les personnes parce que les volontés du défunt étaient inconnues
  • Les documents disponibles pour recueillir les volontés ne sont pas ou peu connus des personnes concernées et des professionnels et ne répondent pas à l’ensemble des préoccupations.

A la suite de cette recherche action un groupe de travail a été mis en place pour la conception d’un nouveau support. Ce groupe constitué de 8 personnes (1 chargée de mission, 1 chef de service, 1 travailleuse sociale et 5 résidants rémunérés pour ce travail) s’est réuni une fois par mois pendant un an et tout le monde a participé à toutes les étapes (rédaction d’un cahier des charges, état des lieux de l’existant, vulgarisation du cadre juridique pour une meilleure compréhension, création du contenu, choix de la mise en forme, présentation à la direction et aux partenaires, diffusion). 

  • Globalement, comment l’association s’organise concrètement pour permettre un meilleur respect des droits des personnes accompagnées en lien avec la loi 2002-2 et dans un cadre de vie de tous les jours ? 967

La participation est depuis toujours une valeur phare du Relais Ozanam et plus largement du Groupement des Possibles (groupement associatif dont fait partie le Relais Ozanam), au quotidien cela se décline de diverses manières selon les dispositifs et ne se limite pas à la mise en place de CVS (conseil de vie sociale) dans les structures. 

Pour la développer en interne et en externe, une plateforme de soutien à la participation a été conçue (pour accompagner les personnes mais aussi les institutions et les professionnels). 

Des personnes accompagnées sont engagées dans le conseil d’administration. 

Dans les projets de construction de nouveaux dispositifs des personnes concernées (accueillies, ou pas encore) sont associées à la réflexion. 

Elles participent aussi à la mise en place de nombreux projets, notamment ceux portés par la Plateforme ViP (tel que l’outil présenté précédemment). 

Afin de déhiérarchiser les savoirs, un choix a été fait de rémunérer les personnes pour ce travail.

  • La loi 2002-2 a-t-elle véritablement été une révolution dans la prise en compte des droits des usagers dans les secteurs social et médico-social ? (est-ce qu’elle a conduit à une évolution radicale des pratiques ? est-ce que les usagers ont véritablement été plus pris en compte depuis lors ?) 651

En mettant l’individu au centre de l’accompagnement, la loi 2002-2 est, en théorie, une révolution dans la prise en compte des droits des usagers. Dans la pratique, cette révolution nous semble plus nuancée. 

Pour certaines structures, cela a été un bon levier pour faire évoluer les pratiques et outiller les modalités d’accompagnement. Cependant, beaucoup agissent encore pour les personnes, sans les personnes. 

Le besoin de créer des plateformes de soutien à la participation, comme on l’a fait au sein de notre association, montre que le chemin à parcourir est encore.

Il faudrait un changement de paradigme profond pour que les pratiques changent. 

  • Voyez-vous des obstacles à la bonne mise en œuvre de la loi ? 569

Les professionnels sont soumis à des injonctions contradictoires. D’un côté la demande d’application de la loi 2002-2, d’un autre des obligations de résultats. Or on le sait, faire avec les personnes, respecter leur choix…, sont des processus lents et longs.

L’un des objectifs principaux à la bonne mise en œuvre de la loi est le manque de temps pour les professionnels. A cela s’ajoute la vision encore trop partagée du travailleur social sachant ce qui est bien pour l’autre et parfois le manque de compétence pour mobiliser les personnes concernées et leurs savoirs.

  • Si la loi GAA advient, vous semble-t-il qu’elle devrait contenir de nouvelles dispositions sur les droits des personnes en situation de fragilité ? accueillies dans le secteur social et médico-social. 1773

La question des personnes en situation de précarité vieillissantes est bien souvent dans l’angle mort des politiques publiques. Si la GAA advient, cette thématique doit y apparaitre d’une manière ou d’une autre. Parmi les dispositions qui nous sembleraient importantes, nous pouvons citer la prise en compte des vieillissements prématurés et par conséquent la révision des critères pour accéder à certaines aides. Nous pensons par exemple à la barrière des 60 ans, complètement déconnectée de la réalité des personnes que nous accompagnons.

Il serait également pertinent de repenser un décloisonnement plus grand des champs d’intervention entre le social, le médico-social et le sanitaire (formation, financement, organisation des parcours, fonctionnement des structures, coordination…). 

Enfin, la question du maintien à domicile est souvent possible grâce à la présence d’un entourage proche… mais quid des personnes isolées ? Une réflexion devrait être menée pour renforcer l’étayage autour de ces personnes pour leur permettre de vieillir et mourir là où elles le souhaitent, qu’il s’agisse d’un domicile classique ou d’un logement en structure (type Pension de Famille).

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